Les cinquième et sixième cours de langue des signes américaine m’ont rappelé que l’apprentissage d’une nouvelle langue est difficile. Il y a de plus en plus de vocabulaire à mémoriser et de structures à apprivoiser. Pendant une semaine, j’ai eu l’impression d’être à côté de la plaque. Puis, en écoutant les vidéos de cette semaine, je découvre que je comprends à peu près tout. Alors même si j’ai confusément la tête pleine et que j’ai soudainement l’impression de mélanger jusqu’à mes chiffres, je comprends plutôt bien. Si je suis mélangée, c’est sans doute que je suis rendue à l’étape où ça commence à rentrer.
Une langue spatiale
La syntaxe de la langue des signes américaine diffère de celle de l’anglais ou du français pour différentes raisons (que je n’ai sans doute pas encore toutes apprises). La première, je le découvre aujourd’hui, est liée à son aspect spatial. En tant que langue spatiale, l’ASL exige que le locuteur exprime toute situation géographique en commençant par la pointer dans l’espace (pas comme moi dans mon salon qui pointe n’importe où, il faut pointer dans la bonne direction). Voilà qui exige de toujours savoir où tu es par rapport au reste de ton environnement géographique. Si, par exemple, une personne demande dans quelle ville tu vis, tu commences par pointer dans la direction de cette ville avant de la nommer. Ça donne une phrase du genre: « JE + VIS + pointer dans la direction de la ville + nommer ou épeler la ville ».
Si cet aspect montre directement en quoi l’ASL est une langue spatiale, sa syntaxe recèle pour moi encore bien des mystères. J’ai hâte d’apprendre plus de règles de grammaire et de syntaxe.
En guise d’exemples, voici quelques questions en ASL traduites signe pour mot vers l’anglais. Ça vous donnera une idée de la structure.
YOU PREFER DRINK POP SODA YOU?
YOU SPANISH STILL REMEMBER YOU?
APPLE YOU WANT YOU?
TRAVEL YOU LIKE YOU?
23 + 3 HOW MANY?
Nous avons aussi appris à poser des questions en « ou » (« contrastive structure »: lorsqu’on donne deux options de réponse à notre interlocuteur). Voici ce à quoi ça peut ressembler:
YOU LIVE HOUSE (déplacement vers la droite) APARTMENT WHICH?
Dans cette structure, on utilise l’espace devant nous pour mettre les deux options de réponse sur un pied d’égalité. Si on demande à une personne si elle vit dans une maison ou un appartement, on signe la maison d’un côté puis l’appartement de l’autre, à la même hauteur. Voilà qui illustre bien comment l’ASL est une langue spatiale.
Je suis désolée de donner tous mes exemples en anglais. Simplement, ça me semble plus naturel étant donné que j’apprends cette langue à partir de l’anglais. N’hésitez pas à commenter si vous souhaitez avoir des précisions.
Un peu de culture
Les caucus du football
En 1894, l’équipe de football de l’université Gallaudet (seule université exclusivement pour Sourds au monde encore à ce jour), qui affrontait une autre équipe composée de joueurs sourds, a découvert que cette dernière avait vite compris les signes utilisés par leur équipe pour communiquer les directives du jeu. L’équipe de Gallaudet a alors décidé de faire ses caucus en cercle fermé, une tradition qui ne s’est pas perdue depuis… (Signing Naturally, Units 1-6, p. 87)
Lady Di
Saviez-vous que la fameuse Lady Di était relativement fluente en langue des signes britannique (BSL)? Fervente défenseure des droits des Sourds, elle a représenté la British Deaf Association pendant une dizaine d’années. Elle a même choisi de signer le discours qu’elle a fait pour le centième anniversaire de l’association. (Signing Naturally, Units 1-6, p. 121)
The Gum Story
D’ici les prochaines semaines, je dois apprendre cette petite histoire par cœur afin d’être en mesure de la raconter moi-même. Je dois même me filmer, ça fait partie de l’évaluation. Ça va, je comprends ce qui est raconté, mais c’est tout un défi de la reproduire aussi bien que la narratrice… Les sourds qui s’expriment en langue des signes ont un sens aigu des descriptions visuelles et de l’expression corporelle. Ils savent dire beaucoup en peu de mouvements. Et ces mouvements sont toujours précis. Ça m’impressionne.
Attention, je vous divulgue ici l’idée d’ensemble de l’histoire: c’est un garçon qui mâche de la gomme et la colle sur un banc. S’ensuit tout un défilé de personnes qui se prennent les pieds ou les mains dans cette gomme…
Avez-vous compris ce qui se passe à la fin?